Edito de la dernière lettre (oct.2010) d'Info Birmanie :
Sans crier gare, la junte birmane a imposé ce mois-ci au pays un nouveau drapeau, un nouveau nom et un nouvel hymne national. Les instructions de la junte étaient très précises : les anciens drapeaux devaient être descendus par des personnes nées un mardi et les nouveaux hissés par des personnes nées un mercredi. Dernier épisode en date d’une longue série de décisions incongrues, cette nouvelle pourrait paraître anecdotique et prêter à sourire, si elle n’émanait pas d’un des régimes les plus opaques et répressifs au monde.
Un rendez-vous de première importance pour les généraux se profile : les élections législatives, organisées dimanche prochain, le 7 novembre. Ces élections, les premières depuis 20 ans, auraient dû, ou pu, être l’opportunité d’une évolution vers un système gouvernemental plus ouvert et plus démocratique. C’est en fait exactement l’inverse qui va se produire : le profil des candidats ‘autorisés’ à concourir, le maintien en détention de la plupart des opposants, et la constitution qui entrera en vigueur attestent d’un futur renforcement du pouvoir militaire au sommet de l’Etat birman.
En quittant leurs uniformes militaires pour revêtir l’habit civil, le seul changement que les généraux nous proposent est d’ordre vestimentaire. Malgré ce subterfuge grossier, il est probable que des appels à lever les sanctions (économiques et politiques) soient lancés et que le “nouveau” gouvernement soit poliment accueilli au sein de la communauté internationale. Ces appels émaneront de multinationales désireuses d’investir en Birmanie et de gouvernement souhaitant accroître leur influence sur le pays, et seront d’autant plus séduisants si la junte libère Aung San Suu Kyi le 13 novembre. Il est du devoir du gouvernement français de ne pas céder au leurre du ‘changement’ et de maintenir une politique claire à l’égard du régime birman : c’est à ce dernier de démontrer sa volonté de réforme et de changement, et non à l’Europe, qui a déjà fait preuve de beaucoup de patience et de conciliation. La mascarade d’élections que les généraux se préparent à proposer au peuple birman ne répond malheureusement à cette exigence.