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Faire la fête à "la science"

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(version 1.0  -  3.11.2016)

>> version 1.1  -  5.11.2016 - Ajout de la rubrique "Compléments" pour des liens vers des articles utiles.

Du 8 au 16 octobre 2016 a donc eu lieu la fête de la science... mais "la science" est une bien belle chose qui a beaucoup d'ennemis.

Commençons par définir notre mot. Disons que "la science", ce sont: des humains, une méthode, des institutions, du Savoir accumulé, et la mise en oeuvre de ce Savoir... dans une société donnée, en l'occurrence la nôtre.

La méthode

Commençons par la méthode, qui est fondamentale à la validation du Savoir. Création humaine, elle est ce que rejettent ses ennemis les plus évidents, à savoir les idéologies "totalitaires" de type religieux, qui ne tolèrent pas que l'on expérimente la validité de leurs Principes Sacrés...
Cette méthode comporte toutefois un aspect ultra-réductionniste, très efficace dans l'accumulation du Savoir mais qui n'est pas sans poser de très gros problèmes au moment de sa mise en oeuvre. Rappelons-nous les CFC qui, à un "niveau réductionniste", résolvaient effectivement des problèmes mais qui une fois intégrés dans ce système naturel fermé qu'est la Terre, s'amusaient à détruire la couche d'Ozone qui protège la vie (voire la Vie) des rayonnements spaciaux.

Les questions que se pose le scientifique, et la mise en oeuvre d'expériences pour y répondre sont conditionnées par un environnement général, composé à la fois par l'état du savoir de l'époque mais aussi par les a-priori liés à la culture dans laquelle baigne le scientifique et qui l'influencent... comme tout le monde.

Une autre façon de (se) fourvoyer tient dans les détails de l'expérimentation. Expérimenter est censé permettre de vérifier une hypothèse. Si cela ne marche pas, la théorie est fausse (l'exception ne confirme jamais la théorie: elle la détruit) et il faut donc changer l'hypothèse. Le scientifique "malin" va faire en sorte que l'expérimentation, soigneusement contrôlée, confirme l'hypothèse...

Il faut ajouter aux problèmes d'expérimentation ce qui se passe sur le terrain des sciences sociales (économie, sociologie...) où les conditions de départ, les groupes témoins, etc. sont très difficilement reproductibles (moins on est réductionniste, plus la complexité complexifie (!) le travail...

En manière d'exemple de manipulation d'expérimentations en biologie, il y a l'usage d'animaux de test hypersensibles aux cancers. Lorsque vous testez un produit sur eux, vous avez l'assurance par avance de vous défausser du risque cancérogène sur l'animal. "Rien ne prouve" que le produit testé soit cancérigène... Grosse finesse. Comme autre manipulation, on peut prétendre au secret commercial pour ne pas divulguer les détails de vos expériences qui, comme c'est intéressant, défendent toutes l'intérêt et l'innocuité de votre produit.

On pourrait arguer que "tout cela n'est pas de la bonne science". Pourtant cela respecte peu ou prou la procédure expérimentale... La "bonne" science est une belle idée que la société, ses contradictions et ses rapports de force ont tôt fait de ravaler au rang de théorie falsifiée.

Gens de science

Les gens de science, les scientifiques, sont des humains comme les autres mais hyper-spécialisés disposant parfois d'un esprit critique au-dessus de la moyenne. Un.e "scientifique" n'est pas spécialiste de "la science" mais, conséquence du réductionnisme de la méthode, d'une discipline particulière. Dès lors, son avis n'a pas plus de valeur que celui du quidam moyen s'il concerne un sujet hors de sa spécialité.
On se souviendra pour l'anecdote du physicien Georges Charpak (1924-2010) expliquant sur un plateau télé (je l'ai vu, c'était il y a quelques dizaines d'années déjà) que le nucléaire ne posait pas de problèmes de santé. Tout avis personnel sur le sujet mis à part, un physicien n'a aucune compétence en Santé individuelle ou publique...
On pourrait aggraver encore la situation en avançant que l'hyper-spécialisation permet certes un avis éclairé sur le domaine concerné, mais que la vie réelle, la "réalité", n'est pas hyper-spécialisée. Elle est "systémique". De multiples paramètres et domaines variés entrent en jeu. L'avis d'un scientifique classique n'est donc rien de plus qu'un avis, relativement "noyé" dans la complexité. Il a son importance, bien évidemment, mais la question de la complexité doit être abordée différemment lorsqu'on en vient à l'utilisation pratique de Savoirs.

Mais le/la scientifique doit bien manger tous les jours, et éventuellement se payer une voiture plus puissante que celle qu’il a déjà. Il n’y a pas de raison... Deux possibilités s’offrent alors: le secteur public ou le privé... ou la navigation entre les deux...

Côté Public, et bien qu'il ne soit pas à l'abri de problèmes bien humains, la mise en oeuvre d'une politique "ultralibérale" conduit la plupart des États à réduire leurs "coûts" et donc à se séparer des centres de recherches publics (entre autres démissions). Il y a donc à priori moins de travail à visée fondamentale et à rentabilité hypothétique voire nulle. Or le Public doit pouvoir, sans s'inquiéter de l'aspect "mise en oeuvre" accumuler le Savoir. Le Privé lui, de part son mode de fonctionnement, est bien incapable de le faire...

La corruption systémique est telle désormais que même le Public en est réduit à développer des Savoirs ultra-spécifiques destinés eux-même à la vente au privé. Le secteur privé, donc, est conditionné de manière à ce que le Savoir qu'il produit (ou qu'il achète ou "vole légalement" à la recherche publique) puisse être mis en oeuvre le plus rapidement possible pour des raisons bêtement financières. On notera que l'approche réductionniste est très pratique, puisqu'elle permet de limiter les frais de recherche de toxicité possible, d'interactions hasardeuses, etc. Le systémique, c'est à priori plutôt compliqué, donc cher mais aussi risqué. Les CFC ne se seraient probablement pas vendus si l'on avait prévu les risque sur la couche d'ozone... L'esquive réductionniste permet donc des économies pour le court terme, et tant pis pour le reste... 
Notre scientifique qui doit gagner sa vie ne peut que très difficilement entrer en conflit avec (les intérêts de) son employeur. ll  doit même parfois les défendre contre son propre avis. On fait ce qu'on peut.

Pour ce qui est des institutions... Elles ne sont que l'émanation des rapports de forces en oeuvre dans cette société. Celles qui ont une base Publique sont de plus en plus gangrénées par les infiltrations des intérêts privés à la chasse au Savoir exploitable et à la manipulation des décisions légales pouvant influencer leurs affaires.

Science en société

La spécialisation est parfois difficile à "gérer" lorsqu'on passe du plan scientifique à celui de la société. Si plusieurs disciplines sont disponibles dans un même domaine, disons par exemple l'agriculture, laquelle aura la préférence de "la société" ? Entre l'hyper-industrialisme bio-technologique et l'agroécologie (discipline scientifique également productrice de Savoir et de techniques), comment va se faire le choix ? Qui va le faire ?

L'idéal serait une collaboration des approches (vision systémique), mais dans notre régime économico-politique, c'est ce qui rapporte le plus et le plus rapidement qui est (encore largement) promu et "choisi". Il est plus que probable que ce ne soit pas le meilleur choix à moyen/long terme... Ainsi les OGM montrent très rapidement leurs limites (résistances multiples, non prise en compte de problèmes complexes - sécheresse, excès d'eau, associations de cultures - ingérables par le bricolage transgénique, même avec un couteau aussi pointu que crispr-cas9, symbole de l'ultra-réductionnisme). Même la technique basique montre ses limites, quand le travail du sol... détruit ce même sol, etc. Ajoutons à cela les questions plus larges de rapports de dominance de monstres politico-industriels (brevets, exploitation des humains) et la durabilité des solutions (pollution nouvelle... ). La balance raisonnable entre les deux approches est vite faite, mais c'est la balance techno-commerciale qui a la prévalence.

Evidence des évidences, mais pas toujours aussi évidente pour tout le monde : "La science" ne peut être extraite de cette société. Ses principes - créations humaines perfectibles - sont bien utiles et "jolis", comme souvent les principes. Ils se heurtent toutefois au système social lui-même qui, dans la Pratique, conduit à de multiples problèmes qu'une approche systémique permet de sérier.

On peut alors définir assez facilement ce que doit être le principe de précaution, tout au moins sur le versant scientifique: Il doit se placer juste avant la mise en oeuvre du Savoir, et consiste en une approche transdisciplinaire la plus large possible, permettant de comprendre/prévoir les effets de la mise en oeuvre d'un Savoir (parcellaire car acquis par la méthode réductionniste) sur le système global. Cela ne donnera pas des certitudes - de telles choses sont des illusions, mais permettra d'anticiper le plus possible les problèmes à venir, ce qui est bien là le minimum qu'on puisse attendre d'une "science" moderne qui ne soit pas inféodée au court-termisme économique. On décide de prendre le temps de ne pas se précipiter contre le mur... qui peut n'être parfois qu'une illusion médiatique au service des vendeurs d'airbags.

L'avis démocratique, aussi éclairé que possible par la formation des citoyen.nes de base, viendra confronter cet avis scientifique avec les autres aspects de la société ( démocratie, durabilité, etc. ) et choisir parmi les solutions proposées, ou pas... Rien (?) n'est impossible (!?) à une assemblée citoyenne éclairée et, bien évidemment... tirée au sort !

Mais tout cela n'est pas dans l'intérêt des monstres économico-industriels d'aujourd'hui qui font les décisions politiques ( cf TTIP ou CETA ). Cela ne va pas non plus dans l'intérêt d'une certaine partie des scientifiques qui ont souvent l'arrogance de leur Savoir microscopique - sinon nanoscopique ! - mais qui fait leurs fins de mois. On fait avec ce qu'on a (bis).

Cette approche systémique ne sera pas mise en oeuvre, sinon à des niveaux non-critiques pour la structure politico-économique, et "la science" sera toujours plus corrompue, à l'image d'ailleurs du reste de la société, où "tout s'achète et tout se vend", y compris les joyaux de l'intelligence Humaine.

Pour une conclusion plus positive...

De nombreuses initiatives fleurissent, coopératives, solidaires qui combattent le monstre. On ne peut que s'en réjouir... Parce que la production scientifique, tout le monde en mange !

Compléments

"Eradiquer Alzheimer" ou la médecine des conséquences.

 

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