Mon commentaire à l'article Pourquoi (et comment) critiquer la technologie aujourd’hui ? :
Il me semble que l'on aurait intérêt à définir nos termes, car la manière de comprendre/résoudre un problème passe beaucoup par la façon dont on le pose.
Pour moi:
Science=méthode d'acquisition de savoirs.
Technique=modification de la réalité à partir du savoir acquis.
Techno-science= ensemble des deux catégories, liées mais différentes.
La science est la méthode la moins stupide d'acquisition du savoir, mais elle n'est pas sans faiblesses.
- Elle est réductionniste. L'étude en labo est une réduction, une simplification de la réalité qui permet de faciliter le travail, mais qui produit des savoirs partiels. La "réalité" est un système d'interactions complexes dont une partie est supprimée de l'évaluation scientifique, ce qui a des conséquence pour la suite...
- Elle est spécialisée. A des fins d'efficacité à court terme, la spécialisation produit des compétences limitées qui elles aussi ne prennent pas (ou mal) en compte les aspects systémiques de la réalité. On a par exemple des spécialistes d'une discipline qui pensent que la seule solution disponible pour résoudre un problème passe par l'utilisation de leur savoir spécialisé. Dans une réalité complexe, il n'est pas impossible que d'autres spécialités permettent d'atteindre le même objectif, et parfois dans des conditions plus simples et moins risquées (exemple type: la génomique *contre* l'agroécologie)
- Elle est humaine. La science, ce sont des scientifiques, qui ont les mêmes forces et faiblesses que tout le monde, mais avec parfois un certain niveau d'arrogance supérieur à la moyenne.
- Elle est sociale. La société humaine impose ses principes et pratiques, en général liées à l'économie, jusqu'à parfois formater des manières d'acquérir le savoir qui permettent de faciliter la rentabilité.
La technique utilise les savoirs acquis par la science. Ces savoirs étant partiels, leur utilisation produit automatiquement des effets "secondaires" non évaluées. Les CFC, les antibios et les polluants en général résultent de la mise en oeuvre d'un savoir partiel qui résout effectivement des problèmes mais qui, omettant le contexte systémique, produit des effets nocifs.
Les CFC étaient un progrès au niveau du sol, et une catastrophe en haute atmosphère.
Pour limiter les risques liés à ces éléments, il conviendrait de généraliser la transdisciplinarité, le principe de précaution (dont la transdisciplinarité est elle-même un outil permettant l'évaluation), d'éviter le court-termisme autant côté recherche que côté économique, limitant ainsi les effets de la finance sur tout le processus.
Un vaste programme (à mieux définir certainement), mais qui permettrait de limiter les risques liés aux effets "secondaires" qui finissent par devenir primaires. La biosphère terrestre n'est pas un labo réduit aux paramètres qui nous arrangent.
Ah, et aussi, un peu plus de modestie de la part des technoscientifiques serait un plus considérant les limites que l'on vient de voir, mais c'est peut-être là le plus difficile.